Les MAIS-phémérides, un nouveau segment historique de MAIS, l’émission, visent à consigner dans notre mémoire collective quelques faits et personnages historiques qui, d’une manière où d’une autre, apportent un éclairage sur les questions et les enjeux d’actualité.
Inspirées d’éphémérides choisies en fonction des dates de diffusion de l’émission, les MAIS-phémérides permettent de mettre l’Histoire en dialogue avec elle-même.
Le 12 février 1934, la gauche française faisait front commun contre la montée d’un fascisme décomplexé porté, entre autres, par les Jeunesses patriotes qui comptaient dans leurs rangs quelques universitaires phalangistes et autres étudiants réactionnaires. La grève générale du 12 février est le point culminant de la crise du 6 février 1934 reconnue à l’époque comme étant le plus important mouvement d’agitation urbaine en France depuis la Commune de Paris de 1871, dont il a été question à quelques reprises dans les MAIS-phémérides de janvier.
La crise a eu pour effet de favoriser l’union de la gauche et la radicalisation de la droite, mais aussi d’inspirer des nouvelles pratiques de maintien de l’ordre public, dont, notamment, celle d’interdire les manifestations dont l’itinéraire n’a pas été préalablement été autorisé par les autorités publiques.
Le 12 février 1809 marque aussi l’anniversaire de naissance d’un certain Charles Darwin, éminent naturaliste dont les travaux ont révolutionné la biologie moderne. Sa théorie de l’évolution et de la sélection naturelle, publiée au milieu du 19e siècle a bouleversé les conceptions théologiques des origines de l’humanité, comme la théorie de Galilée sur la rotation de la Terre deux siècles plus tôt avait chamboulé la conception anthropocentrique de l’Univers.
Ce qui est encore plus reversant, c’est que 150 ans plus tard, l’enseignement de la théorie de l’évolution de Darwin fait encore débat! Une étude publiée par Science en 2011 révélait que 40 % des professeurs de biologie dans les écoles publiques américaines n’acceptaient pas la théorie de Darwin et qu’à peine 13 % l’enseignent explicitement et positivement.
Comme on n’en est pas à un paradoxe près, les plus farouches opposants au Darwinisme scientifique, sont souvent les premiers partisans du Darwinisme social : cette théorie politique qui transpose le concept de sélection naturelle à la société humaine, alimentant les pires dérives eugénistes et génocidaires du XXe siècle, et que le sociologue russe Jacques Novicow définissait en 1910 comme « la doctrine qui considère l’homicide collectif comme la cause des progrès du genre humain ». L’idéologue à qui l’on attribue la paternité de ce sinistre concept, Herbert Spencer, suggérait plutôt que « toute protection artificielle des faibles est un handicap pour le groupe social auquel ils appartiennent, dans la mesure où cette protection a pour effet […] de le mettre en position d’infériorité face aux groupes sociaux rivaux ». Difficile de ne pas voir un lien entre cette idéologie d’une autre époque et le sabotage actuel des politiques sociales, dont le démantèlement du système d’éducation publique, gratuite et universelle est l’un des principaux exemples.
Nicolas Copernic, né le 19 février 1473, est reconnu pour avoir posé les principes de l’héliocentrisme, une théorie révolutionnaire en astronomie à l’époque qui contredisait la croyance selon laquelle la Terre était centrale et immobile. Comme la théorie de l’évolution de Darwin, l’acceptation de la théorie héliocentriste de Copernic a été l’objet de virulents débats tant au sein de l’Université que du monde politique et religieux — tous trois intrinsèquement liés à l’époque. Ces débats opposant science et religion se poursuivront pendant deux siècles, et les livres de Copernic et de l’un de ses principaux successeurs, l’italien Galiléo Galilée, seront d’ailleurs mis à l’index par les autorités religieuses, et ce jusqu’au milieu du 18e siècle, peu de temps avant la Révolution française.
Le 19 février marque aussi l’anniversaire de l’adoption de la Loi de « sûreté générale » qui marque l’apothéose du virage autoritaire du Second Empire français. Adoptée le 19 février en 1858, la Loi de sûreté générale, aussi appelée la « loi des suspects », s’inscrit en réponse à une tentative d’attentat contre l’empereur Napoléon III.
La loi permettait notamment de punir de prison toute tentative d’opposition et autorise l’arrestation et la « transportation » des personnes suspectes, c’est-à-dire ceux ayant été condamnés pour délit politique depuis les troubles de 1848. Contrairement à la déportation en bonne et due forme, la transportation des suspects est une procédure administrative qui ne nécessite pas de jugement. Cette loi antiterroriste avant la lettre, prévoyait également des amendes ou des peines de prison contre les crimes séditieux.
« Que ceux qui ne conspirent pas se rassurent », aurait affirmé le président de l’Assemblée législative française, Charles Demorny, pendant les débats devant le Corps législatif.
Le 26 février 1848, la Seconde République française, formée suite à la révolution de 1848, supprime la peine de mort en matière politique. La peine de mort en matière criminelle sera maintenue en France jusqu’en 1981. Fait à noter, l’écrivain Victor Hugo, né le 26 février 1802, a participé aux mouvements de 1848… du côté du pouvoir dont il était proche.
C’est le 26 février 1885 que prend fin de la conférence de Berlin. Sous couvert de nobles objectifs comme le « désenclavement du continent africain » ou « l’éradication de l’esclavage et de la traite musulmane », l’objet de la conférence est en fait le partage colonial de l’Afrique. La France obtient le contrôle de l’Afrique de l’Ouest, tandis que l’Angleterre commence à s’aménager un axe reliant le détroit du Nil au nord à la pointe sud de l’Afrique — axe qu’elle complétera en annexant le protectorat allemand du Tanganyika une vingtaine d’années plus tard. La Belgique obtient pour sa part le contrôle d’une vaste portion de l’Afrique centrale, qui demeurera pendant 23 ans la possession personnelle du roi Léopold II.
Le 26 février 1971 marque par ailleurs l’anniversaire de naissance d’Erykah Badu. L’an dernier, la chanteuse afro-américaine, reconnue pour son engagement social et politique aux États-Unis, a été prise dans une controverse, après avoir offert une performance dans le cadre des célébrations du 46e anniversaire du roi Mswati III du Swaziland, un pays d’Afrique australe situé entre l’Afrique du Sud et le Mozambique qui est l’une des dernières monarchies absolues du monde.