Une semaine après la dernière cérémonie de Vélo Fantôme, les rues de Montréal ne sont pas plus sécuritaires pour les cyclistes.
« On peut retourner sur les lieux et constater à quel point rien n’a changé », soupire la porte-parole de Vélo Fantôme Montréal, Gabrielle Anctil. La militante déplore que, trois mois après le dépôt du rapport sur la Cohabitation sécuritaire entre les usagers vulnérables et les véhicules lourds en milieu urbain, les cyclistes soient toujours aussi mal protégés face à la « violence routière ».
Rien n’a changé
« Depuis qu’on pose des vélos fantômes, rien de concret n’a changé », s’indigne-t-elle en soulignant que les circonstances qui ont mené à la mort de Meryem Anoun récemment sont en tous points identiques à celles qui ont conduit la mort d’une autre cycliste l’an dernier. Il y a moins d’un an, Justine Charland-Saint-Amour avait été happée par un poids lourd à l’angle d’Iberville et Rosemont alors qu’elle se trouvait dans l’angle mort du camion lors d’un virage à droite.
« Le deux tiers des vélos fantôme qu’on a posés, c’était suite à des collisions avec des poids lourds », note Gabrielle Anctil qui ajoute que la moitié des collisions mortelles commémorées par Vélos fantôme se sont produites à des intersections.
Une cartographie diffusée par La Gazette la semaine dernière montre que la majorité des décès commémorés par Vélos Fantôme Montréal depuis 5 ans sont survenus sur les artères de Rosemont–La-Petite-Patrie et du Plateau-Mont-Royal. Gabrielle Anctil y voit une triste « ironie du sort », puisqu’il s’agit pourtant de deux des arrondissements qui ont été les plus proactifs pour assurer la sécurité des usagers vulnérables, notamment en abaissant les limites de vitesse et en investissant dans l’aménagement de saillies de trottoirs.
Passer de la vision à l’action
Le développement d’ensemble du réseau cyclable relève cependant de la responsabilité de l’administration centrale qui, malgré toutes les annonces des derniers mois concernant la stratégie Vision zéro, tarde à passer de la parole aux actes en matière de sécurité des cyclistes, dénonce la porte-parole de Vélos Fantôme.
« Les actions, à notre avis, ne suivent pas », confirme de son côté le porte-parole de la Coalition Vélo Montréal, Daniel Lambert, qui se dit frustré de constater que « le vélo n’est toujours pas considéré comme un mode de transport viable » par les autorités de la Ville de Montréal. Comment augmenter significativement la part modale du vélo si les trajets ne sont pas sécuritaires faute d’infrastructures adéquates, s’interroge le militant.
Aménager des infrastructures cyclables
« Ça nous frustre de voir tous ces réaménagements des artères sans pistes cyclables », ajoute Daniel Lambert en pointant notamment du doigt la réfection à l’identique de la rue Saint-Denis l’an dernier. À l’heure actuelle, « on fixe l’aménagement de Montréal pour les prochains 50 ans », souligne-t-il en insistant sur l’importance de faire une place aux aménagements cyclables dans les projets d’infrastructures. Or, on apprenait cette semaine que la piste cyclable prévue sur l’avenue Laurier Ouest ne verra pas le jour.
S’il est préoccupé par la difficile cohabitation avec les camions de marchandises sur les artères, le porte-parole de la Coalition vélo Montréal s’inquiète particulièrement de la cohabitation avec les poids lourds impliqués dans les travaux d’infrastructures. « Ces camions traversent des zones avec une forte densité de piétons et de cyclistes », souligne Daniel Lambert qui estime que la Ville devrait prévoir dans ses contrats que les camions lourds utilisés par les entrepreneurs soient équipés de dispositifs de sécurité pour réduire les risques de collisions mortelles.
Avec une dizaine d’années de travaux en perspective, la question de la gestion des chantiers devrait également être au cœur des préoccupations des autorités publiques. En effet, les chantiers d’infrastructures routières entrainent parfois des entraves et des détours sur le réseau cyclable qui mettent la sécurité des cyclistes en danger, comme c’est souvent le cas pour les piétons.