Des locataires réclament l'interdiction d'Airbnb

Le Comité logement du Plateau Mont-Royal (CLPMR) a tenu une manifestation réclamant l’interdiction pure et simple de la populaire plate-forme à Montréal.

Constatant l’incapacité de la réglementation provinciale à juguler le problème des locations touristiques illégales, le CLPMR estime que l’interdiction d’Airbnb représente la solution de dernier recours.
Réglementation insuffisante
« Règlementer, ça n’a pas réglé le problème », lance la coordonnatrice du comité logement, Carole Boucher. Elle cite l’exemple de New York où plus de 10 % du parc immobilier existant est offert en location sur Airbnb malgré une réglementation renforcée l’an dernier.
« On ne vise pas nécessairement les locataires qui font du Airbnb » pour arrondir leurs fins de mois, explique Carole Boucher qui compare les impacts négatifs d’Airbnb à ceux d’Uber. Alors qu’Uber fait compétition déloyale à l’industrie du taxi, Airbnb accentue la pression immobilière et cause des nuisances. « Ça créé des problèmes de quartier », explique-t-elle.
« On vide les quartiers », s’indigne pour sa part la militante du CLPMR Liliane Dufour qui a elle-même été évincée en 2015 d’un logement qu’elle occupait depuis 14 ans sur la rue de la Roche. « Où est-ce qu’on nous envoie? », demande la septuagénaire qui n’a pas réussi à se reloger sur le Plateau et qui déménagera bientôt pour la troisième fois en moins de 3 ans.
Les « super-locateurs » dans la mire
La manif-action, qui a rassemblé une cinquantaine de personnes sur le Plateau, visait à dénoncer les super-locateurs qui convertissent des logements locatifs en résidences touristiques illégales.
Les manifestantes et les manifestants ont déployé une première bannière devant un bâtiment situé au 15 Marianne Ouest, où la compagnie de locations touristiques Sonder offre des appartements en location à court terme, notamment via Airbnb. Pamplemousse.ca a tenté sans succès de joindre l’entreprise qui a obtenu l’an dernier un financement en capital de risque de 13 millions de dollars.
Une deuxième bannière a été déployée au 771 Mont-Royal Est au-dessus de la terrasse du bar le Saint-Sacrament. Selon les recherches du CLPMR, la compagnie Home in Montreal y louerait à longueur d’année de grands logements familiaux. Un logement offert sur Airbnb y aurait été réservé plus de 750 fois depuis 2012. Il n’a pas été possible de contacter Home in Montreal pour obtenir de commentaire.
Des propriétaires-occupants aussi ciblés
Un troisième et dernier arrêt devant un immeuble résidentiel situé en face du parc La Fontaine a été ciblé par le CLPMR. Les propriétaires qui étaient présents lors du passage de la manifestation se sont dits choqués d’être pris à partie de la sorte.  « Je comprends les gens dans les quartiers qui vivent le dérangement », assure le propriétaire du rez-de-chaussée qui se défend d’être un super-locateur.
Selon les informations obtenues par le comité logement, la résidence aurait été louée 93 fois sur Airbnb depuis 2014. « On loue quelques jours par année », admet le résident qui affirme par ailleurs que lui et sa famille sont des membres actifs de la communauté qui tiennent à leur quartier et qu’ils s’assurent que leurs locataires touristiques respectent la quiétude du voisinage.
Sa conjointe qui indique ne pas avoir connaissance des règlements interdisant les locations touristiques temporaires en secteur résidentiel reconnaît qu’il est nécessaire de revoir l’encadrement d’Airbnb. Elle se dit notamment favorable au prélèvement de taxes à la source.
Une action immédiate réclamée
« On ne peut pas se permettre d’attendre plus longtemps avant d’agir », maintient Philippe Desmarais, organisateur communautaire au CLPMR. L’étude sur les impacts d’Airbnb réalisée l’an dernier révèle en effet que la multiplication des locations touristiques illégales exerce une pression à la hausse sur les loyers en plus de causer des nuisances et de retirer des logements du marché locatif régulier.
Sans rejeter complètement la proposition du député de Mercier Amir Khadir qui propose de resserrer les règles régissant les locations touristiques, le CLPMR estime que la position des élus, tous paliers de gouvernement confondus, est « trop faible », martèle Carole Boucher.